Ce récit autobiographique nous plonge dans l’enfance de Boubou Hama, qui raconte avec une perspective d’enfant ses premières années de vie au début du XXe siècle, en Afrique occidentale française (AOF). À travers les yeux d’Albarka, le lecteur découvre les traditions, les croyances et les épreuves d’un jeune garçon songhaï.
Un apprentissage ancré dans la tradition
Le récit débute vers 1910 dans le village de Fonéko, au Niger. Jusqu’à ses sept ans, Albarka grandit sous l’aile de ses parents et de sa grand-mère qui lui transmet les savoirs essentiels. À travers contes et rites initiatiques, il apprend les lois de son peuple : les interdits, les légendes et son identité en tant qu’homme songhaï. A chaque question, à chaque interrogation, la tradition et la culture offrent une réponse…
L’arrachement à son monde
Un événement bouleverse cette enfance heureuse à Fonéko : l’administration coloniale exige qu’un enfant de huit ans de chaque village soit envoyé à « l’école des Blancs ». La communauté est sous le choc, et Albarka est désigné. Commence alors un nouvel apprentissage, bien différent de celui qu’il a connu jusque-là. L’école lui impose une langue étrangère, une discipline rigide et un mode de vie où les punitions sont fréquentes. Dans ce monde où la parole est une arme, Albarka découvre que les mots peuvent être une force face à la domination coloniale. Malgré les difficultés, il s’adapte, progresse et devient l’un des meilleurs élèves.
« Les Occidentaux ne se rendent souvent pas compte qu’un Africain, même illettré, sait, au minimum, deux langues. Il est plus courant qu’il en sache trois ou quatre. Et le peul, le bambara, le sonraï, le haussa, l’arabe sont des langues aussi différentes, entre elles, que le français, l’anglais, l’allemand, le hongrois ou le russe. »
Tome 2, p.48
Un témoignage sur la colonisation
À travers L’aventure d’Albarka, Boubou Hama offre un témoignage puissant sur l’impact de la colonisation sur l’éducation et la transmission des savoirs traditionnels. Ce récit initiatique met en lumière la dualité entre l’héritage culturel et l’imposition du modèle occidental, entre l’enracinement et le déracinement.
« Pour la première fois, je vis le travail forcé. Nous venions de passer devant la résidence du gouverneur, en banco, comme toutes les résidences des Blancs à cette époque… Des files de jeunes femmes et de jeunes filles, arrachées à leurs lointaines familles, portaient sur la tête des paniers remplis de terre. Elles les vidaient, revenaient, recommençaient, sous les cris humiliants des gardes et, quelquefois, sous les coups. Elles étaient salies par la terre, et leur visage disait leur peine.
Je frémis d’indignation, de honte, d’impuissance. J’appris bien plus, ensuite, sur le travail forcé qui, ici, n’était pas trop dur, car le gouverneur habitait la ville et des journalistes pouvaient y passer. Et on ne voulait pas que la France apprenne toute la vérité sur certains aspects de la colonisation.
Maintenant, je sais qu’une armée de conquête, quel que soit son pays, ne se conduit jamais autrement… qu’en armée de conquête. Avec un cortège d’humiliations, d’exactions, d’horreurs, de crimes…
La colonisation n’est toujours qu’une exploitation. On n’a qu’à regarder l’histoire du monde.
Autrefois, ou maintenant. »
Tome 2, p.99
Ce livre est un ouvrage à la fois pédagogique et empreint de poésie, qui invite à une réflexion sur l’identité, la mémoire et la transmission des cultures.
Editions et traduction
Plusieurs éditions du livre L’aventure d’Albarka de Boubou Hama et Andrée Clair existent en 1 ou 2 tomes :

- L’aventure d’Albarka (255 p.), Julliard 1972
- L’aventure d’Albarka (dans L’Afrique), Cl. Bourdet et J. Suret-Canale, Ed. du Burin (préface de L.S. Senghor), 1973
- L’aventure d’Albarka (2 tomes) NEA-Edicef, 1981
- L’aventure d’Albarka (197p. / Collections: Francopoche) NEA-Edicef & A.C.C.T., 1989
- L’aventure d’Albarka (2 tomes / Collections : Afrique en poche junior) NEA-Edicef, 2003
Traduction
Une traduction en polonais a été publiée sous le titre Albarka – znaczy szansa par la maison d’édition Nasza Księgarnia en 1977 (traduction: Katarzyna Witwicka).
